La Fondation Thalie

Texte écrit en avril 2022

La Fondation Thalie est une plateforme de réflexion, de collaboration et de production innovante mettant en avant la transversalité et la pluridisciplinarité. Dans sa forme même, la fondation qui est aussi résidence d’artistes et d’auteur.e.s, dépasse l’entité physique dans laquelle elle déploie une partie de ses projets à Bruxelles. Ses actions de mécénat hors-les-murs, son antenne à Arles inaugurée à l’été 2022 et la sphère de réflexion globale qu’elle anime montrent que la Fondation Thalie est constamment en mouvement.

À l’image de la muse sous la protection de laquelle elle se place[1], son champ de réflexion et d’action fleurit en se ramifiant en quatre axes principaux : donner une plus grande place aux femmes dans la création contemporaine, défendre les savoir-faire, réfléchir frontalement aux questions écologiques et valoriser l’écriture créative ainsi que le livre. Elle abolit les hiérarchies et les frontières entre les cultures, les champs et les pratiques. C’est une agora dans laquelle artistes, chercheur.euse.s, auteur.e.s, philosophes et scientifiques dessinent ensemble de nouveaux narratifs dans un langage commun et optimiste pour construire un futur souhaitable.

 

1)    GENÈSE ET STRUCTURE

·      L’étincelle

Nathalie Guiot est la dynamique fédératrice de la fondation, son étincelle d’impulsion. Journaliste poussée par un désir d’investigation du milieu de l’art contemporain, elle écrit et publie en 2008 Collectionneurs, les VIP de l’art contemporain aux éditions Anabet[2]. Pour ses recherches, Nathalie Guiot se met à arpenter les foires et les ateliers, et dans le processus d’écriture de ce livre sur les collectionneurs devient, elle-même, ce qu’elle étudie. Son œil et son goût se forment et Nathalie Guiot commence à acquérir des œuvres d’artistes vivants, émergents notamment, dont la pratique interroge notre rapport à ce monde en pleine mutation. « J’ai commencé à acheter des œuvres de plasticien.ne.s de ma génération comme Tatiana Trouvé, et d’artistes émergent.e.s, tout en m’intéressant à la plasticité du langage[3] », dit-elle. Le langage, l’écriture et la transmission animent sa collection dès les prémices de sa constitution. Dès le début, sa relation à l’art n’est donc ni passive, ni marquée par le seul désir de possession. Nathalie Guiot veut très tôt travailler avec cette matière et ses réflexes de journalistes reviennent : elle souhaite interroger ces œuvres et leurs créateur.rice.s, ouvrir un espace de dialogue autour d’elleux et inviter d’autres regards afin que chercheur.euse.s, artistes, scientifiques et auteur.e.s s’en nourrissent et s’en servent comme noyau de réflexion.[4] 

C’est ce désir de dialogue et cette conception de l’art comme médiateur qui amènent Nathalie Guiot à créer, en 2012 à Bruxelles, le Thalie Art Project : une plateforme associative de rencontres artistiques et performatives qui lui permet alors de produire plusieurs évènements-performances, comme la performance Experienz, interrogeant le corps comme lien social, organisée au WIELS en 2013 avec la curatrice Agnès Violeau.

L’année suivante, l’association devient véritablement fondation. Bien qu’elle n’ait alors pas encore de lieu dédié, Nathalie Guiot esquisse les fondements structurels de sa démarche : soutenir les artistes dans leurs projets de créations liés à des thématiques sociétales. En 2017, elle inaugure un incubateur de projets artistiques visant à organiser des résidences d’artistes et d’auteur.e.s.

 

·      La maison à Bruxelles

Très vite, Nathalie Guiot ressent « le besoin de se poser[5] » et en 2018 la Fondation Thalie, plateforme interdisciplinaire et résidence d’artistes prend racine dans un ancien atelier d’artiste de Bruxelles, une maison moderniste de 1924 dessinée par Jean Hendrickx [6]. Imaginée dès sa rénovation par le binôme Vanden Eeckhoudt – Creyf architectes dans un style contemporain conservant l’esprit moderniste du lieu. Outre les espaces d’exposition et de travail, la maison dispose d’une bibliothèque, d’appartements pour les résidences et d’un espace cuisine - salle à manger - terrasse. « Plus qu’un laboratoire ou une maison, c’est une véritable ruche qu’est devenu cet espace » nous dit Yann Perreau dans Artpress[7].

La collection de Nathalie Guiot devient le cœur vivant de la fondation et continue d’évoluer au fil de la programmation ; chaque nouvelle exposition entraîne l’acquisition d’une pièce. Sans aides publiques, Nathalie Guiot aura réussi à créer autour de ce corpus d’œuvres, une fondation et résidence d’artistes, ainsi qu’une dense programmation, en seulement 6 ans.

 

·      Une structure constellaire et polymorphe

Ce qui fait la force de la Fondation Thalie, c’est la structure en constellation qu’elle déploie pour rester souple, adaptable. La Fondation Thalie se pense en système solaire avec au centre, l’astre lumineux qu’est la maison bruxelloise et sa programmation (« Sun »). Les lunes de Thalie miroitent ensuite les mêmes valeurs en d’autres venues (« Moons », dont le premier espace sera inauguré à Arles à l’été 2022). Autour gravitent des « satellites » (les projets hors-les-murs) et des « planètes » (amis de la Fondation) créant une véritable communauté transfrontalière.

Entre ces entités physiques flotte un ciel dématérialisé, un réseau de production de contenu déployant une intelligence collective portée par des rencontres, des podcasts, des vidéos, des lectures et performances. La Fondation Thalie hybride donc le Think tank, le label et la maison d’art, et le mot fondation s’émaille de cette sphère d’action expansive. L’expérience humaine s’incarne dans une communication perceptive avec le monde[8] et c’est dans cette démarche souple, sensible, à l’écoute, que s’inscrit la Fondation Thalie.

 

2)    LA FONDATION AUJOURD’HUI, MISSIONS ET CHAMPS D’ACTIONS

·      L’art engagé

La Fondation Thalie s’engage via l’art dans les grands débats de société actuels. « À l’heure où le politique et le religieux ne parviennent plus à convaincre, ma conviction est que l’artiste doit s’engager », dit Nathalie Guiot[9]. Fervente défenseuse de l’idée qu’art et engagement doivent se décloisonner pour dialoguer ensemble, elle souhaite « quitter le ghetto de l’art contemporain[10] », pour faire émerger de nouveaux modes de pensée et d’action en croisant les champs artistiques et sociétaux. Passer d’un rapport de possession à un rapport de production et de transmission, pour faire sens commun. Dans notre société qui a cruellement besoin de s’émerveiller à nouveau et de construire de nouveaux narratifs, les artistes, en apportant leurs visions prospectives, sont des témoins de notre époque et agissent comme des lanceur.euse.s d’alerte[11]. Dans cet esprit, la Fondation Thalie s’engage sur quatre grands axes :

1-    La visibilité des femmes dans la création contemporaine

Thalie met un point d’honneur à défendre, présenter, acquérir et publier les travaux de plasticiennes, auteures, poétesses et chercheuses.

En 2020, La Fondation Thalie présente Land & Language, une série de peintures d’Agnès Thurnauer inspirées par la crise migratoire. « La frontière est un lieu de crise. C’est aussi le passage d’une langue à une autre », confie l’artiste dont l’œuvre toute entière est tournée vers l’exploration de ces espaces de perméabilité du langage. Si la langue sépare les êtres[12], elle est aussi vectrice de liens. Migrer vers une autre culture peut s’inscrire dans un mouvement d’ouverture à l’Autre et de (re-)construction de Soi.

L’exposition monographique de Kiki Smith, Inner Bodies, courant jusqu’en juillet 2022, rassemble un corpus d’une trentaine d’œuvres de l’artiste. Dans sa pratique, Kiki Smith s’intéresse à ce qui est périphérique, considéré comme mineur, éloigné d’un discours patriarcal dominant. Ses œuvres construisent une cosmogonie dominée par un panthéon féminin qui, bien que personnel, aborde les thèmes universels de l’enfance, des mythes et des contes. Nathalie Guiot cite à propos de Kiki Smith[13], Femmes qui courent avec les loups de Clarissa Pinkola Estes qui montre que chaque femme a en elle une force naturelle, instinctive, fruit d’un savoir immémorial que malheureusement la société et la culture ont muselé afin de la faire entrer dans le moule réducteur des rôles assignés. Avec Inner Bodies, Kiki Smith entreprend une « fouille psycho-archéologique » de l'inconscient féminin en mettant en lumière une histoire du monde trop souvent tût, dont nos corps gardent pourtant la mémoire : corps social, corps politique, corps divinisé ou corps invisibilisé.

2      - L’intelligence des matériaux et du geste

Mettre en valeur les savoir-faire à travers des pratiques où l’art et l’artisanat se complètent est la seconde mission que s’est donnée la Fondation Thalie. Elle découle des affinités sensibles de Nathalie Guiot qui a souhaité, avec sa collection et la Fondation, « revenir aux fondamentaux de l'art (…) et montrer des réalisations manuelles, allant à rebours d'une dématérialisation et de choses trop conceptuelles, trop sèches où parfois on ne sait plus très bien où se situe l'œuvre[14] ». C’est dans cette dynamique que s’inscrivent, par exemple, les expositions Spring et The Sowers, organisées en 2021.

La première présentait un nouvel accrochage de la collection autour de la question du savoir-faire et du geste avec des œuvres textiles rendant hommage au legs d’Anni Albers. En se plaçant sous l’étoile de celle qui, au sein de l’atelier de tissage du Bauhaus a révolutionné l’approche créative de ce médium et fait de nombreux.ses émules, la Fondation Thalie nous invitait à adopter un nouveau regard en nous faisant partager la poésie et la beauté d’œuvres habituellement exposées dans nos intérieurs. L’accrochage, présentant les travaux d’une quarantaine d’artistes, était à vivre comme une investigation intellectuelle, sensible et sensitive.

L’exposition The Sowers (« les semeurs »), co-curatée avec Anissa Touati, continuait ces explorations discursives et sensibles en présentant le travail de 26 artistes faisant dialoguer le principe de trame avec la terre elle-même, deux éléments témoins de l’évolution des cultures et des peuples, mémoires de rites ancestraux, fruits de l’intelligence de la main, vecteurs de langages et de récits, et empreints d’une conscience universelle écologique.

De façon générale, la Fondation Thalie aime à faire se rencontrer les grands axes de ses missions ; pluridisciplinarité et transversalité sont au cœur de l’identité de la fondation : les artistes femmes sont mises en lumière et les œuvres présentées convoquent à la fois les mythologies contemporaines et anciennes, le langage, l’intelligence de la main et la conscience écologique.
 

3      – Réfléchir frontalement aux questions écologiques

Face à l’urgence écologique que rencontrent nos sociétés, la Fondation Thalie défend une troisième mission : faciliter un dialogue entre arts et sciences, décloisonner les disciplines pour inciter à l'action collective.

L’exposition « Invisible, Seascapes », du photographe Nicolas Floc’h, a été imaginée comme un état des lieux du monde sous-marin face aux défis environnementaux. L’ensemble des photographies présentées à la Fondation Thalie en 2021 mettait en lumière les recherches du photographe et révélait l’impact du changement climatique sur l’équilibre des écosystèmes sous-marins.

En plus d’irriguer les expositions, les rencontres, les projets hors-les-murs et éditoriaux, le troisième axe de la Fondation Thalie brille également dans un canal de réflexion et de transmission dédié : le podcast-vidéo Parole de créateurs face à l’urgence écologique que la Fondation Thalie lance en 2020 en pleine pandémie du Covid-19. Au fil de ses 18 enregistrements et plus de 32 000 vues (en 2021), la plateforme d’échange devient un véritable levier pour penser un monde en mutation.  

Parole de créateurs face à l’urgence écologique, est une série de conversations qui a pour objet d’insuffler de nouveaux récits pour des futurs souhaitables. En générant une pensée nouvelle et féconde faisant tomber les frontières entre les champs, les pratiques et les pays, artistes et chercheur.euse.s construisent ensemble sur un « common ground[15] » transindividuant[16], le monde de demain. Comme le soulignent Kader Attia, Fabien Léaustic ou Thijs Biersteker[17], les artistes sont eux-mêmes des chercheur.euse.s qui rendent visible l’invisible de manière poétique. Elles/ils aident à nous faire « ressentir les faits[18] » et nous apprennent à désapprendre, à lire différemment le monde[19].

Une thématique qui ressort clairement à la suite de ces échanges est l’injonction à ne pas céder à la collapsologie[20]. Face à l’écocide[21] provoqué par l’activité humaine, allons-nous montrer les dégâts ou choisir de montrer les beautés du monde pour lequel nous devons nous battre ?[22] Tou.te.s les invité.e.s du podcast s’entendent pour valoriser la création artistique comme canal privilégié afin de rétablir le contact avec la nature et son pouvoir de fascination et d’émerveillement. « Les artistes amènent la vision d’un monde nouveau. Elles/ils donnent des clefs, des pistes, des voies poétiques », annonce Kader Attia[23].

            Ces conversations – qui rythment les douze mois d’une année – nous poussent à voir que tout est relié en combattant une vision linéaire et productiviste du monde et en y réinjectant du sensible, de la poésie, du scientifique et de la philosophie. Elles font germer des envies d’agir et de ré-enchantement, un désir impérieux de « rallumer les étoiles[24] ».

 

4      – Un refuge pour l’écriture créative

Sortir du récit dominant en valorisant l’acte d’écriture et de nouveaux narratifs[25] est la quatrième grande mission de la Fondation Thalie. Il était essentiel pour Nathalie Guiot, journaliste, auteure et éditrice, que la fondation participe activement au rapprochement entre littérature et art.

C’est pourquoi les résidences de recherche de la Fondation Thalie accueillent tout au long de l’année des artistes et des auteur.e.s sélectionné.e.s sur projet à partir d’un appel à candidatures initié une fois par an. Au total, une quinzaine d’artistes et d’auteur.e.s ont bénéficié.e.s de ces résidences depuis 2018.

Et les thèmes d’investigation privilégiés par la fondation se recoupent dans le choix même des résident.e.s, comme par exemple avec Joseph Schiano di Lombo, qui en résidence à la Fondation Thalie en 2021 travaille à la transcription musicale de son premier roman L’Oxymore dans un décloisonnement des pratiques auquel la fondation est sensible. Ou encore avec Salvatore Arancio qui en résidence la même année crée un livre d’artiste intitulé Scenes of Wonder in Many Lands. Dans son travail, Arancio s’intéresse à la manière dont les images et leur signification peuvent être déviées ou recadrées. S’écartant de leur sens littéral, Arancio crée des juxtapositions inattendues amenant de nouveaux sens d’interprétation, à la fois évocateurs et profondément inquiétants, qui nous questionnent sur le pouvoir des images et le récit général du monde.

En 2019, la Fondation Thalie, avec à la Fondation Hippocrène et la Fondation Camargo, lance un appel pour une résidence de recherche et de production pour la période 2019-2020. L’appel s’adresse à un binôme entre un.e artiste visuel.le et un.e écrivain.e invité.e.s à proposer un projet ensemble qui engage une réflexion prospective sur les défis auxquels l’Europe est confrontée aujourd’hui. Deux binômes sont lauréats de la bourse de production : Mary Rinebold et Danai Anesiadou pour Europis et Mathis Collins et Emilie Renard, pour Les Faiblesses de l’art et de la magie - la circulation de quelques figures vernaculaires en Europe.

Les soirées Équinoxes - plateforme de lectures poétiques - fleurissent pendant le confinement alors que la fondation propose de puiser dans la littérature les pépites de nos grands écrivain.e.s et artistes plasticien.ne.s pour re-poétiser nos vies. « La poésie est notre rose des vents », annonce Nathalie Guiot comme étendard lors de ces cessions. Après le succès des Équinoxes en ligne, la fondation se met à accueillir dans ses espaces à Bruxelles la soirée éponyme dédiée à la poésie et à inviter à chaque occurrence une vingtaine de poètes.ses, de lecteur.rice.s, d’écrivain.e.s et musicien.ne.s. Les textes de ces soirées Équinoxes sont publiés dans les recueils du même nom.

En parallèle et à l’issu du confinement, Nathalie Guiot crée la revue Traversée. « Le premier numéro de cette revue rassemble des femmes que j'aime et qui étaient confinées à différents endroits du monde, en panique parce qu’elles devaient rentrer chez elles. Je leur ai demandé ce qu’étaient leurs traversées à elles[26] ». Vingt artistes témoignent de la façon dont ce temps suspendu a influencé leur pratique artistique. Traversée devient ensuite une plateforme éditoriale avec laquelle auteur.e.s et lecteur.rice.s peuvent s’éloigner du bruit du monde et renouer avec une dynamique de créativité.

Enfin, en 2020, Nathalie Guiot ajoute une étoile à sa constellation et crée la maison d’édition Ishtar, d’après le nom de la déesse astrale mésopotamienne. Les Éditions Ishtar publient de la poésie contemporaine, des livres d’artistes, des ouvrages sur la transition écologique ainsi que la revue Traversée et les recueils d’Équinoxes. La maison d’édition est donc le canal d’expression et de transmission papier de l’intelligence collective et sensible que défend la Fondation Thalie

 

·      « Satellites » ; le mécénat hors-les murs

Dès 2016, la Fondation Thalie initie et développe des programmes d’éducation artistique à destination des enfants défavorisés en proposant des ateliers aux 6 à 15 ans avec des artistes invité.e.s, à l’instar du projet réalisé en décembre 2016 dans une école d’enfants dalits (caste des intouchables) en Inde. La Fondation Thalie embarque pour Manachanallur, ville de 140 000 habitants dans l’Inde du Sud. Pendant trois semaines, les artistes sélectionné.e.s pour leurs pratiques engagées et leur esprit pédagogique[27], ont animé des ateliers photos, vidéos, sculptures, dessins et collages et ont présenté le fruit de leur travail dans le cadre d’une exposition collective. « Cette expérience fut intense, magnifique. Nous avons réalisé une exposition finale de tous les travaux dans l’école : l’ensemble des villageois se sont déplacés, c’était une vraie fête, » confie Nathalie Guiot à L’Officiel Art[28].

Entre 2017 et 2021, Thalie multiplie les actions hors-les-murs en s’associant notamment à l’évènement « Le Troisième Paradis » organisé pendant le festival Nuit Blanche (2019) à l’invitation de l’association Thanks for Nothing et de la Cité des Sciences et de l’industrie à Paris. Mais aussi en apportant une aide à la production au court-métrage La Couleur des Rois de Simon Dara et Julien Dara, en soutenant le projet « Les faiblesse de l’art et de la magie » d’Émilie Renard et Mathis Collins (2020) ou en apportant son soutien à l’édition de l’ouvrage Les Monts Analogues de René Daumal (Editions Gallimard, octobre 2021). En 2021, la fondation est également partenaire de Cyril Dion et de son film Animal ainsi que de la soirée d’ouverture du festival « Agir pour le Vivant » au Théâtre Antique à Arles.

 

3)    LA FONDATION THALIE, DEMAIN

·      Arles, un nouvel espace d’exposition, de résidences et de philanthropie

La première lune de la constellation Thalie est arlésienne ! La fondation bruxelloise installe en Provence sa première antenne « Moons » dont l’axe principal sera de valoriser les travaux de céramistes contemporain.e.s. L’intelligence de la main, le lien avec la Terre, la place des femmes et les projets liés à l’édition continuent de se développer en cette nouvelle venue qui sera visitable sur réservation. Le lieu, qui présentera un accrochage de la collection de Nathalie Guiot sera aussi dédié à de nouvelles commissions de projets, accueillera des résidences d’artistes et d’auteur.e.s en perpétuant les dialogues transdisciplinaires entre artistes visuel.le.s et artisan.e.s. Dans cette région où la culture de la poterie est grande et où de nombreux artistes historiques sont venu.e.s chercher dans la terre et le feu provençaux d’autres voies d’expressions plastiques[29], la Fondation Thalie ouvre un nouvel espace de recherche, de transmission et de production autour de la céramique artistique contemporaine.

En 2022-2023, la Fondation Thalie continue également son soutien à l’éducation artistique en inaugurant un partenariat avec l’école du Domaine du Possible, à Arles. Ensemble, la Fondation Thalie et l’école conduiront dès septembre 2022 des ateliers artistiques s’inscrivant dans le cursus pédagogique des élèves. Parmi les artistes invités : Karine Rougier (exposée à la fondation en 2019), Nicolas Floc’h (exposé au printemps 2021), Mathis Collins (résident de la Fondation Thalie en 2020 avec Emilie Renard), Lucy et Jorge Orta.

·      L’exposition Warché à Bruxelles

La prochaine exposition de la Fondation Thalie Bruxelles, Warché (« chantier » en arabe) sera curatée par la commissaire Anissa Touati[30] et présentera les travaux de l’architecte Lina Ghotmeh et des artistes Sarah Ouaddou et Emilija Skarnulyté. Fidèle à ses axes d’investigation, la Fondation Thalie continue de valoriser les pratiques artistiques pluridisciplinaires, le dialogue entre arts visuels et savoir-faire ainsi qu’à mettre en lumière les recherches de plasticiennes, architectes et chercheuses.

Dans le cadre de cette nouvelle exposition, la fondation questionne ces témoins que la terre fait de nous et la responsabilité de nos interprétations. Warché se concentre sur le thème de la trace en s’articulant autour de l’histoire personnelle de Lina Ghotmeh, architecte originaire de Beyrouth qui se définit comme « archéologue du futur, puisant dans le passé pour écrire l’avenir[31] ». Deux artistes contemporaines l’accompagnent dans cette exposition collective : Emilija Skarnulyté qui travaille sur la perception du temps géologique et son influence sur l'Histoire, notamment l’inscription dans la terre des grands conflits de l’humanité, et Sara Ouhaddou qui explore les thèmes de l’Histoire des constructions et des pertes d’identités architecturales. Warché nous plonge dans les ruines et les reconstructions successives de l’activité humaine et nous devenons simultanément les témoins d'un monde passé, contemporain et futur.


[1] Thalie vient de Thália qui en grec ancien signifie « la Joyeuse », « la Florissante » ou « l’abondante » (de θάλλειν / thállein, « fleurir abondamment, verdoyer »). Elle est une des 9 muses et préside à la Comédie.

[2] Maison d’édition qu’elle a elle-même fondée en 2000.

[3] Nathalie Guiot à Virginie Chuimer-Layen dans La Gazette Drouot, le 28/09/2021.

[4] « Au fur et à mesure de cette collection, je me suis aperçu que finalement, ce qui comptait pour moi, c'était de pouvoir écrire, produire et d'être vraiment en contact avec ces artistes. Les accompagne », Nathalie Guiot sur France Culture le 20/09/2021.

[5] Nathalie Guiot à Pauline Vidal dans Le Journal des arts du 27/06/2019.

[6] Jean Hendrickx est élève d’Eugène Viollet le Duc et de Henry Van de Velde. La maison bourgeoise du début du XXe devient ensuite l’atelier d’une artiste italienne avant que les différents bâtiments qui connectent la structure soient entièrement rénovée en 2018.

[7] Yann Perreau, « La Fondation Thalie : l’Art de la transversalité appliquée », Artpress, 07/03/2020.

[8] Merleau-Ponty, Maurice. Phénoménologie de la perception [1945], Gallimard, Paris, 2012, p.376.

[9] « Thalie Lab / Bruxelles devient La Fondation Thalie ! », par Yamina Benaï, L’Officiel Art, 27/05/2019.

[10] Ibid.

[11] « Cette capacité de l’artiste à être alerte », Jean de Loisy dans la rencontre « Conversation » organisée par la Fondation Thalie, ayant pour thème les nouvelles fondations face aux enjeux de société.

[12] Selon la Bible, les humains ne parlaient auparavant qu'une seule langue. Un jour leur vint à l'idée de construire une tour qui atteindrait les cieux par sa hauteur, et leur permettrait ainsi d'accéder directement au Paradis. On nomma cette tour la "tour de Babel" ("porte du ciel"). Mais Dieu, les trouvant trop orgueilleux, les punit en leur faisant parler des langues différentes, si bien que les humains ne se comprenaient plus. Ils furent alors contraints d'abandonner leur entreprise et se dispersèrent sur la Terre, formant ainsi des peuples étrangers les uns des autres.

[13] Dans la Libre Belgique du mercredi 19/01/2022.

[14] Nathalie Guiot dans « Thalie Lab / Bruxelles devient La Fondation Thalie ! », par Yamina Benaï, L’Officiel Art, 27/05/2019.

[15] Le concept de « common ground » ou de « langage commun » revient souvent dans ces conversations.

[16] Création d’un individu collectif lors d’une rencontre ou d’une conversation de plusieurs individus.

[17] Podcast #9 – « Conversation - Kader Attia & François Gemenne. » / Podcast #2 – « Conversation Jean-Pierre Goux & Fabien Léaustic. » / Podcast #16 – « Conversation Thijs Biersteker & Meriem Bouamrane. »

[18] « To help people feel the facts », Thijs Biersteker dans le Podcast #16.

[19] « I encourage all of us, whatever our beliefs, to question the basic narratives of our world, to connect past developments with present concerns, and not to be afraid of controversial issues ». Yuval Noah Harari, Sapiens, Albin Michel, 2015, phrase d’ouverture du livre.

[20] Théorie de l'effondrement global et systémique de la civilisation industrielle, considéré comme inéluctable à plus ou moins brève échéance, et des alternatives qui pourraient lui succéder.

[21] Un écocide est la destruction ou l'endommagement irrémédiable d'un écosystème, notamment par un processus de consommation, qui traduit la surexploitation de cet écosystème, intentionnelle ou non.

[22] Question posée par Valérie Cabanes, juriste spécialisée dans les Droits de l’Homme et le Droit humanitaire, en conversation avec l’artiste Rossella Biscotti, dans le Podcast #17.

[23] Kader Attia dans le Podcast #9 – « Conversation - Kader Attia & François Gemenne. »

[24] Guillaume Apollinaire, Prologue des Mamelles de Tirésias, 1917.

[25] « The urgency is to change the narrative of us humans living on earth. From a species destroying each other and the others species and our environment in which we don’t see we are fully intricated and co-dependant, to a species that can become the guardian, the protector of the living. The narrative has to be changed. » Meriem Bouamrane dans Podcast #16.

[26] « Comment les fondations d'art contemporain s’impliquent-elles auprès des artistes ? », diffusé le 20/09/2021 sur France Culture.

[27] Lionel Estève, Lucile Adam, Rachel Monosov, Lisa Lapierre, Claudia Radulescu, Stéphane Guiran, Philippe Terrier-Hermann ainsi que Nathalie Guiot.

[28] « Thalie Lab / Bruxelles devient La Fondation Thalie ! », par Yamina Benaï, L’Officiel Art, 27/05/2019.

[29] Tel.le.s que Henri Matisse, Pablo Picasso, Jean Cocteau, Jean Gerbino ou encore Suzanne Ramié, Alice Colonieu, Jean Derval, Roger Capron, Gilbert Portanier, Francine Del Pierre ou Gilbert Valentin.

[30] Anissa Touati est une des trois commissaires de la Fondation Thalie avec Joël Riff et Nathalie Guiot.

[31] « Lina Ghotmeh, archéologue du futur » par Maryse Quinton, The Good Life, 12/11/19.

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